«
LES INFORTUNES DE LA VERTU »
SADE
Edition
poche
«
Les Infortunes de la Vertu » est un conte philosophique au gré
d’épisodes initiatiques et épiques. Juliette et Justine, filles
d’un riche commerçant, sont diamétralement contraires autant que
l’éclat de leur beauté les oppose. L’une, magnifique et
charnelle, sans inhibition ni scrupule est prête à braver la vie
par tous les moyens ; l’autre plus jeune, sel d’attique de la
subtilité et de l’esthétisme, est soucieuse du respect d’autrui.
Cultivée, croyante, sa douceur témoigne d’une aménité et d’un
altruisme pour ceux qui l’entoure. Toutes deux sont élevées au
grain de la rigueur catholique d’un couvent. Une malheureuse «
Banqueroute » oblige le père à abandonner son affaire, femme et
enfants pour fuir en Angleterre. La mort de la mère scelle l’avenir
incertain des filles.
Livrées
à elles-mêmes, Juliette ne tarde pas à tirer profit de la nouvelle
situation en devenant libertine, la maîtresse d’un aristocrate
puis Mme de Lorsange ; Justine plus réservée, fidèle aux préceptes
que lui dictent la Providence, est abusée dans sa probité et dans
son corps, livrée en pâture aux libertins, subissant outrages,
sévices, humiliations, que le cortège de pratiques sexuelles
effrénées vient encourager.
Ses
abus sont le prétexte pour certain de ces libertins de la rendre
complice de crimes aux prises du glaive de la justice. Lorsque ses
bourreaux ne l’entrainent pas dans le meurtre ou le vol, Justine
est confrontée à des tentatives de formation intellectuelle
efficace à l’individualisme absolu le plus cru pour tirer le
bénéfice d’une jouissance résolue, exprimée par le raffinement
de supplices, de souffrances entre extase mystique et opportunisme
fanatique. Le conte, embrasé par des états de jouissances et de
souffrances, perçoit l’extrémisme comme une émancipation, une
libre disposition de soi tout en pointant que la conscience doit
encadrer ces expériences pour éviter la barbarie et le chaos.
Les
antagonistes de Justine proposent d’user des qualités de ceux qui
assouvissent leur appétit d’autoritarisme pour mieux les dominer,
préempter leurs biens, les réduire à l’esclavage et abuser d’eux
en toute bonne conscience puisque droit et morale ne sont plus un
gage d’égalité. Contrepouvoir et opportunisme résonne au creux
de l’oreille de Justine. Elle s’en libère mais au détour d’une
infortune de plus, accusée de crimes puis écrouée, elle échappe à
la corde in extremis.
Justine
conte sa vie d’infortunes à Juliette de Lorsange qui découvre que
la victime n’est autre que sa sœur. Sur ce, les Lorsange la
soigne, la réhabilite, quand en plein bonheur retrouvé Justine
meurt brutalement foudroyée. Démontée par l’absurde tragédie de
l‘existence, Juliette se repent de son passé libertin, quitte Mr
de Lorsange pour une vie sobre et vertueuse en plein couvent, ne
s’adonnant qu’aux plaisirs de l’esprit dans le doux souvenir de
sa sœur martyr. La morale de l’histoire est sadienne, car être
heureux réside bien dans la vertu à condition que les souffrances
sur terre soient assez fortes pour expier en paix.
Yves
Toussaint
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